Le projet d'aménagement menace le fleuve Tagliamento

 

Tagliamento, le roi des fleuves alpins menacé

Les associations internationales de protection de l'environnement sont consternées :
le gouvernement italien s'attaque au dernier fleuve alpin quasi non aménagé reconnu internationalement


Le Tagliamento est un fleuve du Frioul (extrême est de l'Italie) qui se jette dans la mer Adriatique après un parcours de 175 km. Les principaux affluents (Lumiei, Degano, But et Fella) s'écoulent dans la partie montagneuse et convergent vers le Tagliamento pour donner au réseau hydrographique son aspect digité . Hormis les derniers kilomètres avant la mer, ce fleuve alpin est encore exceptionnellement préservé. La dynamique fluviale y est particulièrement remarquable et intacte, ce qui lui vaut d'être considéré comme un modèle et un cas d'école pour des générations d'étudiants d'universités européennes.
Le régime des précipitations, en averses violentes, est responsable du régime hydraulique torrentiel du Tagliamento. Celui-ci entraîne des épisodes de crues violentes d'une ampleur considérable dans la plaine alluviale. Ce phénomène se combine avec l'influence des marées de l'Adriatique qui se fait sentir jusqu'à 25km de l'embouchure pour donner des crues phénoménales dans la partie aval.

map of the riverbasin (gif, 920 k)

 

Aux grands maux … les mauvais moyens
Pour protéger les hommes des inondations fréquentes, les premières digues apparaissent au début du XIX siècle. D'autres digues sont ensuite mises en place en 1850 sur les 35 km précédant le delta. Le canal de Cavrato est également creusé et permet de dévier les fortes eaux lorsque le débit du fleuve dépasse 2000m3/s. Après 1850, les digues enserrent le fleuve sur toute sa partie aval. Les zones humides longeant le fleuve et une partie du Lagon de Marano sont drainées. Les prairies et les pâtures sont transformées en parcelles cultivées.
Le régime hydraulique du fleuve ainsi modifié par l'homme entraîne des crues de plus en plus fréquentes et violentes à l'aval du bassin. Les conséquences de ces aménagements sont d'autant plus inquiétantes que les scientifiques prévoient que le lit du fleuve va s'exhausser jusqu'à ne plus pouvoir contenir les crues. Ces dernières iront s'épandre dans les zones topographiquement plus basses, aujourd'hui très anthropisées.
A l'heure actuelle, le seul remède envisagé pour éviter les problèmes dus aux aménagements présents serait de rehausser les digues et de maintenir le canal de Cavrato en bon état de fonctionnement. Un projet de construction de trois bassins de rétention d'une capacité totale de 30 Mm3 et d'une surface de 14 km2 est en discussion. Ces bassins seraient construits dans une zone de culture intensive en plein lit majeur et réduiraient encore le champ d'expansion des crues.

Des alternatives durables et respectueuses : l'option des corridors fluviaux
De nombreuses ONGs et scientifiques s'accordent pour dire que d'autres alternatives que ces bassins de rétention, qui ne résoudrons pas le problème de la protection des populations et des biens à moyen et long terme, sont à étudier.
L'option la plus durable serait de mettre en place des corridors correspondant aux champs d'expansion des crues. Ils sont à déterminer en fonction des zones historiques appartenant au Tagliamento (anciens lits, zone d'inondations habituelles,…).

Le WWF Italie soutenu par de nombreuses ONGs internationales de l'arc alpin (dont ERN) dénoncent le plan de contrôle des crues aujourd'hui en place. Ce plan, qui ne respecte pas la balance écologique du fleuve et ne propose pas assez de protection aux populations concernées, est en contradiction avec les politiques actuelles de gestion qui concilie le contrôle des crues avec les aspects écologiques et le bien être des populations. Avec ces ONG nous menons donc campagne pour développer des mesures innovantes et soutenables de régulation des crues dans la zone aval aménagée sans impacter sur le caractère unique du corridor. Nous pèserons de tout notre poids pour que des mesures exceptionnelles soient prises (parc naturel, réserve de biosphère...) pour préserver le patrimoine naturel exceptionnel que représente le fleuve et sa plaine alluviale considérée par les spécialistes comme la dernière grande plaine alluviale naturelle des Alpes.

 

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